(Quand les hommes de Dieu prennent le combat que les panafricanistes ont fui)
Tandis que le Cameroun s’achemine vers une élection présidentielle en octobre 2025, les projecteurs sont braqués sur un candidat de 92 ans, Paul Biya, qui se prépare à briguer un huitième mandat. C’est un moment crucial pour l’avenir du pays, mais le silence de certaines figures camerounaises, connues pour leurs prises de position panafricanistes, est, pour le moins, troublant.
Ce silence contraste vivement avec la voix de l’Église qui s’élève, forte et claire. Récemment, Monseigneur Samuel Kleda, archevêque métropolitain de Douala, a courageusement lancé un appel pour une « alternance » et a interpellé les Camerounais à « explorer de nouvelles voies pour sauver le pays ». Dans sa lettre pastorale, l’archevêque dénonce sans détour une « mauvaise gouvernance » et une « corruption » qui ont engendré une « pauvreté généralisée ». Il critique également des « élections dont les résultats sont connus d’avance », une pratique qu’il juge moralement inacceptable.
Le double jeu des « panafricanistes » camerounais ?
L’engagement de Monseigneur Kleda met en lumière l’absence de critique de la part de personnalités comme Nathalie Yamb, le professeur Franklin Nyamsi, Alain Foka, ou Jules Domche. Ces derniers, très actifs sur les scènes panafricaines et souvent critiques des gouvernements d’autres pays, notamment en Afrique de l’Ouest, semblent curieusement discrets lorsqu’il s’agit du Cameroun.
Où sont passés ces fervents défenseurs de la souveraineté africaine ? Que disent-ils ou que font-ils quand une figure spirituelle prend les devants pour demander le changement ? Il est aisé de dénoncer l’ingérence étrangère ou les « mauvaises pratiques » à des milliers de kilomètres de chez soi, mais l’injonction à l’alternance dans leur propre pays reste un sujet délicat qu’ils préfèrent apparemment éviter. Ce silence interpelle et soulève une question embarrassante : leur panafricanisme est-il sélectif, ou y a-t-il une autre explication à leur mutisme ?
Leur combat pour le salut de l’Afrique, pour un développement véritable et pour la souveraineté des nations africaines, perd de sa crédibilité s’il ne s’applique pas d’abord à leur propre patrie. Le Cameroun, avec ses crises politiques, sociales et la question de l’alternance, pourrait servir de banc d’essai pour la mise en pratique de leurs idéaux.
L’appel de Monseigneur Kleda : Un combat pour le salut du Cameroun
Le message de Monseigneur Kleda dépasse la simple critique. C’est un véritable appel à l’action civique. En déclarant que « notre pays est malade » et que les « dirigeants semblent ne plus savoir quoi faire », il exprime un ras-le-bol partagé par une partie de la population. Il ne se contente pas de dénoncer, il incite à un changement de mentalité, un retour à des valeurs morales et éthiques.
La voix de l’archevêque est un signal fort que, face à un vide politique, d’autres acteurs de la société civile sont prêts à prendre la parole. Il avait déjà marqué les esprits en qualifiant de « pas réaliste » une nouvelle candidature de Paul Biya. Sa dernière lettre pastorale est une nouvelle étape dans un combat de longue haleine pour le bien-être de ses compatriotes.
Alors que le RDPC qualifie son discours d’« excessif », l’écho qu’il rencontre au sein de la population montre que ces propos sont, pour beaucoup, loin d’être exagérés. La lutte contre la corruption et l’appel à la bonne gouvernance sont au cœur de son message, des thèmes que les panafricanistes auraient pu, eux aussi, porter haut et fort.

Le silence des uns et la détermination des autres dessinent une ligne de fracture. D’un côté, il y a ceux qui dénoncent loin de leurs frontières, et de l’autre, ceux qui, comme Monseigneur Kleda, sont prêts à affronter les défis internes pour guider leur peuple vers un avenir meilleur. L’histoire retiendra-t-elle le silence des premiers ou l’engagement courageux du second ?


