(Mais voilà ce qu’il devra faire pour réussir en beauté le tournant de 2026 en vue d’une bonne retraite)
Le président Patrice Talon n’est pas un monstre. Même si la politique qui implique la gestion de la cité, des hommes exige du prince qu’il suive strictement les prescriptions de l’auteur (Machiavel) du livre du même nom, être cynique, le président Talon sait qu’il n’y a point de fortune à garder des adversaires politiques longtemps en prison ou éloigner du pays.
Mais pour choisir le bon chemin, celui du bon gouvernant, encore faudrait-il qu’il soit lui-même nourri de bons conseils ou être bien inspiré. Sur ce volet important pour la fin de son mandat et la qualité de sa retraite politique, deux thèses s’affrontent dans la tête de l’homme de la Rupture.
Parce que le président d’honneur du parti Les Démocrates (LD) a mal négocié le virage des dernières législatives face aux engagements de neutralité qui ont d’ailleurs fondé le président Talon à le soutenir à faire la paix à Conakry sous la bannière de la Cedeao, le camp des faucons de la Rupture demande à Patrice Talon de ne libérer aucun prisonnier et la même chose pour les exilés. Pour ce courant de pensée, lever le pied de l’accélérateur serait synonyme de donner du contenu à la position des Démocrates et renforcerait leur allant auprès des électeurs qui les confondraient à la solution aux maux qui les rongent. Donc, pas de libération, pas de retour d’exilés avant l’élection présidentielle de 2026. C’est une bonne option. Elle va peut-être permettre à la mouvance de convaincre de sa maîtrise de la situation comme pour appuyer la thèse de Gbadamassi durant les législatives passées, que la pâte reste la propriété du propriétaire de la farine.
Mais il y a peut-être mieux. Et c’est là qu’intervient la deuxième thèse portée par les sages et les visionnaires malheureusement peu suivis par le président Talon. Ces derniers pensent que le président a intérêt à bien finir son mandat en se faisant passer pour le bon père de famille en libérant tout le monde en même temps qu’il demande à tous les exilés de rentrer. Et une bonne assise nationale pourrait lui permettre de maquiller ce projet pour laisser une très bonne image de lui avant son départ de 2026.
Voilà les deux thèses qui trottent dans la tête du président Talon et il lui faudra prendre la meilleure option pour ne pas rater le coach.
QUE DEVRA DONC FAIRE TALON ?
En tirant des leçons de l’histoire des fins de mandat qui n’ont jamais été faciles pour les présidents au Bénin, Patrice Talon se devra de dormir en crocodile, un œil toujours ouvert. Ce qui va se passer pour ne pas dire que cela a déjà commencé, est que son aura ira de mal en pire. Il arrivera malgré toutes ses précautions et ses analyses d’homme très intelligent, qu’il appelle ici des collaborateurs qui ne vont même plus le décrocher. C’est ça le Bénin et les Béninois sont même pires. Cette chute de son aura aura pour conséquence que son choix à la présidentielle de 2026 se heurtera à la désapprobation populaire comme le cas de Zinsou en 2016. Yayi que le peuple adoube aujourd’hui et regrette cruellement le départ, a été celui-là même dont il a rejeté la proposition pour venger une victime, Talon, à qui il a accordé à 65% de son vote au second tour. Ce qui laisse entendre que celui qui aura la chance du dauphinat en 2026 pourrait bien récolter la mauvaise fortune de la fin d’un mandat.
Il sera donc utile pour le président sortant d’adopter une posture à la Mathieu Kérékou : ne désigner personne afin d’expliquer à l’éventuel gagnant qu’il l’a beaucoup aidé dans cette position. Là que ce soit un opposant ou un garçon de la cour, le deal de la retraite paisible sera facilement négociable. Mais pour réussir ce tournant décisif, il faudra pour Patrice Talon de réussir ce jeu de neutralité en faisant descendre tous les exilés à commencer sous de bons hospices la libération de tous les prisonniers. Un jeu pas certainement aussi facile mais dont dépend cette virginité de circonstances qu’il devra s’offrir pour la suite du débat. 2026 est peut-être loin mais il est déjà là et le temps n’est plus totalement l’ami du président Talon.
Aboubakar TAKOU