Au Togo, après la flambée du prix du gasoil et du pétrole lampant, c’est au tour du prix des bouteilles de gaz de monter en flèche, à la suite de la décision du gouvernement de suspendre la subvention du gaz butane. Ainsi depuis le 12 Août 2022, la bouteille de 6kg passe de 3120 Fcfa à 5400 FCFA et celle de 12,5kg de 6500 FCFA à 11300 Fcfa. Une situation péniblement accueillie par les populations qui ne s’y attendaient pas.
Gerry Taama, acteur politique et député à l’Assemblée nationale portant la voix des sans voix a adressé une lettre ouverte au chef de l’État Faure Gnassingbé. Dans sa note, l’homme dans sa publication Facebook a relevé trois bonnes raisons qui poussent à revenir aux anciens prix
« La première concerne les engagements du Togo lors de la Cop 21 en 2015 à Paris, et renouvelés lors des autres conférences, pour limiter le réchauffement planétaire. La seconde concerne votre propre projet environnemental. Le gouvernement s’est engagé depuis une année dans une vaste campagne visant à planter 1 milliard d’arbres sur le territoire sur 10 ans. Et la troisième raison, qui vient confirmer les deux premières est que nos compatriotes vont majoritairement passer au charbon de bois, non pas parce que le gaz avec ces nouveaux tarifs est moins compétitif. Non, même à ces nouveaux prix, il sera toujours plus avantageux d’utiliser le gaz que le charbon de bois ou le bois, mais là où les revenus intermédiaires et élevés vont s’adapter facilement, les petits revenus n’auront d’autres choix que de se tourner vers la biomasse. »
Ici au Bénin, il faut reconnaitre les efforts du gouvernement dont les mesures sociales ont atténué certains effets de la crise économique mondiale à savoir le prix des d’hydrocarbure, des intrants agricoles, du ciment pour ne citer que cela.
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Monsieur le président, pour le prix du gaz, il faut voir (revoir) ça, pardon.
Comme vous le savez, je suis dans l’Est-Mono depuis vendredi dernier. C’est donc sur les réseaux sociaux que j’ai eu l’information sur la hausse du prix du gaz liquide en bouteille. Depuis samedi, j’ai vainement cherché la décision officielle qui instaure ces nouveaux prix, en vain. En règle générale, c’est un arrêté interministériel, signé par plusieurs ministres dont celui des finances, et dans ce cas de figure, celui de l’environnement, qui annonce les nouveaux prix. Pour ce cas-ci, il y a juste ce courrier du ministre du commerce adressé aux sociétés de distribution de gaz. Et puis c’est tout. Si l’affaire n’était pas sérieuse, on aurait pu croire à un poisson d’avril.
Certains l’ont peut-être remarqué, j’interpelle rarement le président de la République, non pas par prudence ou lâcheté (je rappelle que j’ai été candidat aux élections présidentielles de 2015 mais aussi membre actif de tous les regroupements politiques de l’opposition de 2012 (année de la création du Net) à 2015, sans oublier notre implication aux manifestations de la C14 de 2017) mais parce que depuis 2018, je porte plus ma fonction de député et président d’un groupe parlementaire de l’opposition à l’assemblée nationale et à ce titre, mon interlocuteur est le gouvernement.
Mais aujourd’hui, je m’adresse directement au président de la République car l’heure est grave. Monsieur le président, il faut absolument revenir sur la hausse des prix du gaz. En réalité, ces prix n’ont pas fait qu’augmenter, ils ont presque doublé. La bouteille de 6kg anciennement payée à 3120 F passe à 5400F CFA et la bouteille de 12kg de 6500F est vendue désormais à 11300F CFA, soit une hausse de 74%.
Monsieur le président, il faut reporter cette décision pour trois raisons.
La première concerne les engagements du Togo lors de la Cop 21 en 2015 à Paris, et renouvelés lors des autres conférences, pour limiter le réchauffement planétaire en dessous de 2°C, voire 1.5°C par rapport au niveau préindustriel, à l’horizon 2100. Il se trouve que pour agir contre le réchauffement climatique, il faut rechercher la neutralité carbone en faisant en sorte que le taux de rejet de dioxyde de carbone (CO2) n’excède pas la capacité naturelle d’absorption par les milieux naturels (forêts, zones humides, sols agricoles…). Il se trouve aussi malheureusement que l’augmentation du prix du gaz va inexorablement accentuer la consommation du charbon de bois comme palliatif. Et qui dit augmentation de la consommation du charbon de bois, dit réduction du couvert végétal, et accélération du réchauffement climatique.
La seconde concerne votre propre projet environnemental. En effet le gouvernement s’est engagé depuis une année dans une vaste campagne visant à planter 1 milliard d’arbres sur le territoire sur 10 ans, ceci faisant partie des approches du gouvernement pour « gagner le pari d’un développement durable et profitable aux populations ». Quelle serait l’utilité de planter des arbres, s’ils seront destinés dans quelques années à préparer nos repas, au lieu de capturer le CO2 ?
La troisième raison, qui vient confirmer les deux premières est que nos compatriotes vont majoritairement passer au charbon de bois, non pas parce que le gaz avec ces nouveaux tarifs est moins compétitif. Non, même à ces nouveaux prix, il sera toujours plus avantageux d’utiliser le gaz que le charbon de bois ou le bois, mais là où les revenus intermédiaires et élevés vont s’adapter facilement, les petits revenus n’auront d’autres choix que de se tourner vers la biomasse. Et la raison en est simple. Il sera très difficile à une personne vivant au smig, qui a vu son niveau de vie s’effondrer avec le phénomène de la vie chère et la hausse récente des prix des produits pétroliers, de s’adapter aux nouveaux tarifs du gaz. En réalité, cette catégorie de personne, qui constitue la majorité de notre population, s’adapte à toutes les hausses de prix en achetant au détail. Ils n’achètent pas le maïs au sac de 50kg mais au bol, pas le riz au sac de 25kg mais au kilo, ils n’achètent pas l’essence à la station-service mais prennent le boudè. Il se trouve malheureusement que le gaz ne s’achète pas au détail, mais le charbon si. Ces personnes, qui vivent dans une sorte de tontine permanente, vont donc se jeter sur le charbon de bois en l’achetant au détail à raison de 200 à 500f par jour. A la fin, ça leur reviendra plus cher qu’une bouteille de 6kg de gaz mais nous, nous n’aurons plus de forêts.
Voilà pourquoi monsieur le président, je vous demande de considérer la décision de votre ministre de ce vendredi comme un poisson d’avril et revenir sur les prix antérieurs. Ce n’est plus le politicien qui écrit, mais le patriote, qui voit les conséquences terribles que cette décision risque d’avoir sur notre environnement et sur la précarité de nos populations.
Il faut pardonner. Vraiment.
Gerry.