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Politique

Affaire de parrainage au parti LD : Les tout premiers mots de l’He Michel Sodjinou

*L’intégralité de sa déclaration sur la crise qui secoue le parti Les Démocrates

Dans une déclaration incendiaire, Michel François Oloutoyé Sodjinou, coordonnateur de la 19e circonscription, fustige la mainmise de l’ancien président Boni Yayi sur le parti et dénonce un processus de désignation « truqué » pour 2026.

Une onde de choc traverse le parti Les Démocrates (LD). L’un de ses cadres historiques, Michel François Oloutoyé Sodjinou, a rompu un silence pesant dans une longue déclaration rendue publique, pointant du doigt la « dérive » et la « crise de gouvernance » qui, selon lui, minent l’opposition béninoise. Il vise directement l’influence « totale » de l’ancien chef de l’État, Boni Yayi, qu’il accuse de confisquer la voix du parti et de piétiner ses valeurs fondatrices.

Un idéal démocratique trahi

M. Sodjinou, se présentant comme un militant « de la première heure », dresse le portrait d’un parti né « de l’espoir démocratique » mais aujourd’hui asphyxié par « un leadership d’un autre âge ». Il affirme que Les Démocrates, créés pour être une alternative unie et respectueuse de la justice, ont glissé vers « un fonctionnement fermé, dominé par quelques-uns ». Les décisions, prises « dans l’ombre » sans consultation, étoufferaient toute voix discordante, accusée de « rébellion » ou « d’ambition personnelle ».

L’élu établit un parallèle accablant avec l’ancien parti au pouvoir, le FCBE, dirigé par le même Boni Yayi. Il rappelle les « choix imposés d’en haut » de Lionel Zinsou en 2016 et de Reckya Madougou en 2021, qu’il présente comme des erreurs stratégiques reproduisant le « même schéma » et conduisant à la défaite et à la division.

Le « dégoûtant débat » sur l’origine régionale du candidat

Pour la présidentielle de 2026, le scénario se répéterait. M. Sodjinou dénonce un « plan conçu en cercle restreint » et déroulé sans concertation. Il évoque un « débat malsain » autour d’un « auto-parrainage » défendu par Boni Yayi, mais révèle surtout un « débat abject » que les « tenants se gardent de porter sur la place publique » : la « nécessité d’un candidat du Nord ». Cet activisme, selon lui, a « empoisonné l’ambiance » et exclu tout débat transparent.

Il affirme que des députés ont été contraints de signer « à blanc leurs fiches de parrainage », et que des commissions de désignation ont été truquées, avec des représentants remplacés parce qu’ils ne venaient pas de la « bonne région » ou du « bon clan ». Malgré des travaux non terminés, le choix de Me Renaud Agbodjo serait déjà « acté ». « Est-ce cela, la démocratie que nous avons jurée de défendre ? », interroge-t-il.

Boni Yayi, le président au pouvoir « total »

La cible principale de la déclaration est sans équivoque : l’ancien président Boni Yayi. « Le respect que nous lui devons ne doit pas nous empêcher de dire la vérité », assène le coordonnateur. Il accuse le président d’honneur d’exercer une « influence directe totale » sur les organes du parti, au détriment de la collégialité. « Quand le pouvoir personnel remplace la collégialité », résume-t-il, dépeignant un parti fonctionnant comme une « cour fermée ».

Un acte de rupture pour « reconstruire »

Face à cette dérive, Michel Sodjinou annonce qu’il « ne reconnaît pas le processus actuel de désignation du duo présidentiel ». Il se dit incapable d’être « complice d’une mise en scène qui trahit nos principes fondateurs ». Il présente cette prise de position publique non comme un geste de rupture, mais comme un « acte de fidélité » envers les valeurs et les militants.

Il lance un appel à la « responsabilité collective » pour que le parti redevienne « une organisation vivante, pluraliste, où la base a son mot à dire ». Il enjoint ses camarades à se concentrer sur les prochaines législatives et à « reconstruire Les Démocrates sur des fondations solides ».

Cette sortie musclée, qui révèle au grand jour les profondes fractures internes des Démocrates, pourrait significativement affaiblir le parti à l’approche d’élections cruciales, alors que l’opposition tente de se structurer face au pouvoir en place. La balle est désormais dans le camp de la direction du parti, contrainte de réagir à ces accusations qui touchent au cœur de sa légitimité.

Lire ci-dessous l’intégralité du message de l’He Michel Sodjinou

Déclaration de Michel François Oloutoyé SODJINOU

Pour le respect pour le peuple Béninois, mes compatriotes, mes camarades de parti et surtout pour la démocratie interne et la survie politique du parti Les Démocrates, je prends aujourd’hui la parole, non pas par colère, mais par devoir; devoir envers l’histoire de notre pays, de notre parti Les Démocrates (LD), envers les milliers de militants qui croient encore à la justice, au dialogue et à la liberté d’expression. Devoir, enfin, envers ma propre conscience. Je suis Michel François Oloutoyé SODJINOU, coordonnateur de la 19e circonscription électorale du parti LD, élu et militant de la première heure, témoin de nos victoires, de nos douleurs et de nos dérives. Un parti né de l’espoir démocratique.
Lorsque nous avons fondé Les Démocrates, c’était pour offrir au peuple béninois une véritable alternative : une force politique unie, libre, respectueuse des valeurs de justice et de démocratie. Nous voulions bâtir un parti qui ne reproduise pas les erreurs du passé, un parti où chaque voix compte, où le mérite prime sur les vieux démons du sectarisme, des clivages régionaux voire ethniques. Aucun de nous ne pouvait imaginer que nous allions sombrer dans une telle crise de gouvernance du parti comme ce à quoi nous avons assisté et nous assistons encore ces dernières années. L’idéal a été asphyxié par un leadership d’un autre âge.
Une dérive qui a pris un coup d’accélérateur depuis notre congrès de 2023 à Parakou où le parti a changé de direction. Il n’a échappé à personne les discours à la limite de l’humiliation et du regionnalisme, je pèse bien mes mots, du régionalisme qui a motivé ce changement.
Nous avons donc commencé à glisser vers un fonctionnement fermé, dominé par quelques-uns, où les décisions les plus importantes se prennent dans l’ombre, sans consultation, sans transparence, parfois même contre la volonté des militants. Et à chaque fois que nous avons tenté d’alerter, de proposer ou de corriger, nous avons été accusés de rébellion, de trahison ou d’ambition personnelle.

Le parti est progressivement rentré dans une ère de déjà vécue comme aux moments sombres de FCBE dont j’étais déjà militant sous le leadership du Président Yayi Boni alors président de la République. En 2016 vous vous souvenez de la déception d’un choix imposé d’en haut : celui de Lionel Zinsou, parachuté comme candidat du pouvoir sortant. Cette décision, prise sans concertation, nous a conduits à une défaite douloureuse. C’est le même schéma qui a été reproduit, 5 ans plus tard, en 2021, toujours avec le même leadership du Président Yayi, cette fois-ci avec LD. L’histoire s’etait répétée. Contre toute logique démocratique. notre parti a fini par choisir de porter la candidature de Mme Reckya Madougou — une personnalité certes compétente, mais totalement étrangère à la vie du parti. Ce choix, encore une fois décidé dans un cercle restreint, a non seulement divisé nos rangs, mais aussi éteint l’espoir de nombreux militants fidèles qui s’étaient préparés à servir.
Je vous épargne toutes les humiliations, les dérives et les approximations qui ont émaillé le fonctionnement interne du parti depuis lors. Il fallait remettre en cause tout les acquis pendant que le Président Eric Houndété occupait le poste de président du parti et pouvait avoir une parcelle de pouvoir. Une fois que cette position lui a été arrachée (arrachée à Eric Houndété bien entendu), tous ceux qui été dans son équipe devraient subir le martyr sous les coups de boutoir de la nouvelle “caste”. Je m’excuse pour ce langage cru et direct. Mais croyez moi, nous sommes nombreux à avoir subi ces derives. Je comprends que les autres aient opté finalement pour le silence pour ne pas être désigné comme les traîtres ou les empêcheurs anti-yayi. Mais il était nécessaire de rendre justice au peuple en lui montrant comment son combat peut être confisqué au service de causes qui ne servent pas forcément l’intérêt de la nation. Je me promets de verser à l’opinion publique ce que personnellement j’ai vécu dans ma circonscription et qui a été porté à la connaissance du président Yayi sans que cela ne connaisse de suite. Au contraire. Je me garde d’évoquer les atteintes, les provocations, les souillures et les calomnies dont ont été victimes d’autres camarades députés et cadres non issus du bon cercle voire de la bonne région. Je n’ai pas reçu de leur part la permission d’en parler. Mais ils se reconnaissent les nombreux coordonnateurs de zones sur papier mais qui sur le terrain sont dépouillés de leurs prérogatives respectives. Au niveau des départements et des circonscriptions électorales nous avons des dizaines de coordonnateurs sur papier mais dans la réalité à peine 4 ou 5 prennent les décisions.

Pour en revenir à la désignation du candidat à l’élection présidentielle de 2026, nous avons assisté au même scénario : les mêmes méthodes, les mêmes manipulations, la même absence de concertation comme si un plan conçu en cercle restreint va être déroulé. Tout les Béninois ont suivi le débat malsain sur un soi disant auto-parainage qui constituait la ligne de défense du Président Yayi, relayé par une garde rapprochée intellectuelle au sein du parti qui n’ont pas hésité à utiliser les provocations, les intimidations, les agressions verbales voire physiques. Mais est apparu en filigrane un autre débat abject que les tenants se gardent de porter sur la place publique, c’est le dégoûtant débat sur la nécessité D’UN CANDIDAT DU NORD. Cet activisme a fini par empoisonner l’ambiance et à exclure tout débat transparent autour du sujet.

Quand le pouvoir personnel remplace la collégialité Depuis les élections législatives de 2023, qui ont vu notre parti remporter 28 sièges, nous avions un élan formidable. Ce succès devait nous conduire à renforcer nos structures, à consolider nos bases, à rétablir la confiance du peuple. Mais au lieu de cela, nous avons assisté à une centralisation excessive du pouvoir, à des décisions unilatérales et à une marginalisation progressive de plusieurs cadres historiques. Il ne reste donc qu’à dérouler ce plan d’un autre âge.
Sous prétexte d’unité, on a exigé des députés qu’ils signent à blanc leurs fiches de parrainage, sans même connaître le nom du candidat qu’ils parrainaient. On a fait croire que la discipline de groupe signifiait l’obéissance aveugle. On a organisé des commissions de désignation où les équilibres étaient déjà fixés à l’avance, où les représentants de certains
départements ont été remplacés, simplement parce qu’ils ne faisaient pas partie de la “bonne région” ou du “bon clan »
Alors même que la commission n’a pas terminé ses travaux, tout le monde sait que le choix de M. Renaud Agbodjo est déjà acté — un jeune avocat estimable, mais dont personne ne connaît les réalisations politiques. Est-ce cela, la démocratie que nous avons jurée de défendre ?

La dérive d’un leadership sans partage

Je veux le dire avec respect, mais aussi avec franchise : Boni Yayi, notre président, ne peut pas continuer à décider seul du destin de notre parti. Le respect que nous lui devons ne doit pas nous empêcher de dire la vérité. Depuis deux ans, son influence directe sur les organes du parti est devenue totale. Chaque nomination, chaque décision stratégique, chaque arbitrage porte sa marque. Et cela, au détriment de la collégialité que nous prônions à nos débuts.
Ce parti n’a pas été créé pour servir de tremplin à quelques ambitions personnelles. Il a été créé pour redonner une voix au peuple. Et aujourd’hui, cette voix est confisquée. Un appel à la responsabilité collective je n’écris pas pour diviser. Je parle pour sauver ce qui peut encore l’être. Je demande simplement que les règles soient respectées, que le débat soit ouvert, que les militants soient entendus. Nous devons retrouver le sens du collectif, de la loyauté et de la vérité. Je ne conteste pas l’autorité du président d’honneur. Mais je conteste les méthodes qui, sous couvert d’autorité, étouffent la démocratie interne.

Il est temps que le parti Les Démocrates redevienne une organisation vivante, pluraliste, où la base a son mot à dire. Il est temps que nous cessions de fonctionner comme une cour fermée, où seuls quelques privilégiés dictent la ligne à suivre.

Ma position et ma décision

C’est dans cet esprit que j’annonce publiquement que je ne reconnais pas le processus actuel de désignation du duo présidentiel, tel qu’il a été conduit. Je ne peux pas me rendre complice d’une mise en scène qui trahit nos principes fondateurs. Je réclame donc, en toute responsabilité.
Ce n’est pas un geste de rupture. C’est un acte de fidélité — fidélité à nos valeurs, à nos militants et à notre histoire commune.

Reconstruire plutôt que détruire. Je crois encore profondément que notre parti peut se relever. Mais pour cela, nous devons
faire preuve de courage moral. Nous devons accepter de nous remettre en question, de reconnaître nos erreurs et d’écouter la base.
La vraie grandeur politique ne réside pas dans l’autorité, mais dans la capacité à rassembler, à fédérer, à faire confiance.

Je lance un appel à mes frères et sœurs de Les Démocrates : ne cédons pas au découragement.
Ce parti ne s’effondrera pas. Il survivra, car il est porté par des femmes et des hommes sincères, par des militants qui croient encore en un Bénin juste et libre.
Concentrons nos forces sur les prochaines législatives. Gagnons-les avec dignité et
préparons l’avenir, sans rancune mais sans naïveté. L’histoire retiendra toujours ceux qui ont osé dire non à l’injustice, même quand elle se déguise sous les habits du pouvoir.

Conclusion
Je prends donc mes responsabilités, avec sérénité et détermination. Je reste un militant de la démocratie, un défenseur du dialogue et un bâtisseur d’unité. Mais je ne serai jamais complice de décisions imposées, encore moins de manipulations qui déshonorent notre combat.

Pour le Bénin, pour la jeunesse, pour la vérité, il est temps de tourner la page des calculs personnels.

Il est temps de reconstruire Les Démocrates sur des fondations solides — celles de la confiance, du respect et du courage politique.
Je vous remercie.

Michel François Oloutoyé SODJINOU
Coordonnateur de la 19e Circonscription Électorale — Parti Les Démocrates.

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