Le différend entre le Niger et le Bénin, marches des syndicalistes sur la cherté de la vie, ce sont les sujets qui nourrissent l’actualité béninoise ces derniers temps et suscitent beaucoup de réactions. Plusieurs autorités et hauts cadres ont opiné sur ces différents sujets.
A travers un entretien accordé par le président du parti Moele-Bénin, Jacques O.H.S. Ayadji au quotidien La Nation, il a donné son point de vue et fait des propositions sur ces différentes questions.
Lire l’intégralité de l’entretien.
La Nation : L’actualité au Bénin fait état de remous au plan social mobilisant les syndicalistes du fait de la cherté de la vie. Qu’est-ce que cette actualité vous inspire ?
Jacques O.H.S. Ayadji : Je crois qu’il faut laisser les gens s’exprimer parce que c’est démocratique. Mais est-ce que c’est une marche qui va nous amener à régler le problème de la cherté de la vie, notamment la hausse des prix des produits de première nécessité ? Je pense que non. Nous devons prendre conscience de cette conjoncture, que nous soyons employeurs du secteur public ou privé, travailleurs du secteur public ou privé, syndicats, partis politiques de tous bords, acteurs de la société civile, agriculteurs ou simples citoyens, et chercher les moyens pour que ça n’arrive plus. Je pense que ce qu’il y a à faire, c’est de suivre la proposition de Moele-Bénin. Cette proposition de patriotisme économique qui consiste à produire ce que nous consommons et à consommer ce que nous produisons afin de mettre la jeunesse au travail et enrichir notre pays pour lui permettre de faire face au financement de son développement.
Cette année, selon les statistiques, on a produit deux millions de tonnes de maïs pour un besoin national d’un million de tonnes. Mais, il se fait que les deux millions de tonnes n’ont pas suffi, ce qui veut dire qu’il y a eu beaucoup plus de cette céréale en exportation. On peut décider de produire beaucoup plus l’année prochaine à savoir par exemple cinq millions de tonnes parce qu’on ne peut s’interdire d’exporter nos céréales. On réfléchit et on met en place des dispositions pour accroître la production et lui permettre de faire face aussi bien aux besoins locaux qu’étrangers. J’assimile ce problème de cherté de la vie à une déclaration de guerre où on est appelé à taire toutes les divergences, faire face à cette guerre qu’est la conjoncture économique.
L’actualité, c’est aussi le différend entre le Niger et le Bénin. Quelle est votre lecture de cette situation ?
C’est une incompréhension entre les deux pays. On peut comprendre la position du Niger au départ lorsque le Bénin a respecté les injonctions de la Cedeao pour fermer ses frontières. Mais à partir d’un certain moment, le Bénin qui avait fermé ses frontières sur décision de la Cedeao a changé de posture pour l’apaisement de la situation entre les deux pays, contrairement au Niger qui est resté ferme et a maintenu ses frontières terrestres et aériennes fermées tout en ayant ouvert toutes ses frontières avec les autres pays. C’est une situation regrettable qui ne tient pas compte de la souffrance de nos deux peuples, frères et amis.
Situation regrettable ou inacceptable ?
Je peux aller un peu plus loin en parlant de situation inacceptable parce que le Niger n’avait pas à maintenir sa frontière fermée, interdisant ainsi toute circulation de personnes, de biens et des services entre les deux pays. Cependant, le Niger peut-il se permettre d’envoyer son pétrole brut par voie terrestre vers le Bénin ? Je ne vois pas un autre président dans la même situation avoir une autre réaction que celle du président Talon sans reléguer dans les profondeurs la souveraineté de notre pays.
Le gouvernement du Bénin, dans son rôle de défense de notre souveraineté a en effet pris la décision qu’il a prise. Ce que je déplore est que des Béninois, même des partis politiques qui sont appelés à gérer ce pays demain, condamnent la décision de leur président. Le président Talon n’agit pas en tant qu’individu mais en tant que président de la République. Il pose les actions qu’il pose au nom de tout le peuple béninois. Face à la fermeture de la frontière par le Niger de façon sélective, nous devons tous faire bloc derrière notre président afin que notre pays ne soit pas classé au rang des petits pays dont la population ne mérite aucun respect.
Les critiques tablent sur les implications du contrat signé par le Bénin dans cette affaire…
C’est un accord bilatéral signé par deux parties à savoir : la partie béninoise représentée par le ministre des Mines et la partie nigérienne représentée par le ministre du Pétrole. Si on doit poser un acte dans le cadre de l’exécution de cet accord et que c’est le Bénin qui doit prendre l’initiative de cet acte, cela doit venir du gouvernement béninois. Pareil du côté du Niger. Dans le cas d’espèce, le gouvernement nigérien n’a même pas fait la courtoisie au Bénin avant d’acheminer son pétrole sur le territoire béninois par les soins d’une entreprise publique de droit privé. Il faut que les gens sachent raison garder. Notre pays doit être respecté.
Pis encore, le Niger accuse le Bénin d’abriter une base militaire française sur son territoire afin de permettre à la France de l’attaquer. D’abord, c’est faux. Mais à supposer que le Bénin ait décidé d’avoir une base militaire française sur son territoire. En quoi cela concerne-t-il le Niger? Pourquoi la frontière entre le Niger et le Tchad est toujours ouverte alors que le Tchad abrite une base militaire française sur son territoire connue de tous? Le problème est donc ailleurs sinon les mêmes causes auraient produit les mêmes effets aux frontières nigériennes au Bénin et au Tchad. Le Niger ne doit pas venir interférer dans nos affaires. Le Bénin n’a pas de leçon à recevoir du Niger et vice versa. Nous sommes des pays frères et amis et il faut que nos deux gouvernements retournent à la table de négociation pour le bien de tous. J’en appelle au sens de responsabilité de nos deux Etats.