(Le Bénin est juste victime de sa position géostratégique)
Si la raison politique relative à la posture de la CEDEAO suffisait à justifier l’entêtement de la junte militaire au pouvoir au Niger de ne pas ouvrir ses frontières, le Bénin n’aurait aucun problème. Puisqu’il n’assurait ni la présidence en exercice de cette institution encore moins l’ordonnateur de cette consigne punitive à l’encontre de la junte. C’est le Nigéria avec à sa tête, Bola Tinubu qui aurait dû être tenu pour responsable. Le président Patrice Talon n’était en fait que le porte-parole du président Tinubu à la déclaration de la position de la CEDEAO contre la junte militaire.
Alors, pourquoi le Niger garde-t-il sa frontière fermée du côté du Bénin alors qu’il l’a ouverte du côté du Nigeria ?
Ce paradoxe n’a de réponse que dans les positions géostratégiques de la junte militaire au pouvoir. Il faut reconnaitre que le Niger a récemment décidé de l’enseignement de la langue russe dans son pays et pourrait même supprimer le Français s’il le pouvait. L’option d’aller contre la France pour justifier l’accession brutale de la junte au pouvoir, fait boucher la raison aux nouveaux maîtres du pays. Il faut s’allier à tout pour montrer son côté anti-français. La Russie de Vladimir Poutine, n’attendait pas plus pour se venger de l’activisme d’Emmanuel Macron dans le conflit russo-ukrainien aux côtés du protégé de l’Otan. Il faut donc priver la France du précieux uranium du Niger en fermant le seul corridor approprié pour le transport de ce produit. Le Bénin se trouve ainsi victime de sa situation géographique dans une guerre des Grands.
Mais cette raison est loin d’être la seule à l’origine du comportement de Niamey contre Cotonou. La seconde raison, la plus proche de nous est relative à la férocité de la jalousie de Lomé contre Cotonou du fait des résultats palpables des efforts du régime de la Rupture au Bénin. Lesquels résultats font rêver bon nombre de Togolais. Conséquence, le doyen des chefs d’Etat de la sous-région, Faure Gnassingbé, ne pouvant supporter longtemps ce diktat du développement du Bénin sur le Togo, tous les coups sont bons pour éprouver Cotonou. Et puisque le Togo avec son pouvoir clanique n’avait rien à apprendre à la junte militaire, il est leur ami pour n’avoir pas dénoncé le coup de force qui a installé le général Aboudourahamane Tiani.
La troisième raison, elle, a trait à la gourmandise personnelle du général Tiani. La fermeture de la frontière ayant privé l’administration douanière du Niger de recettes au détriment de la contrebande, le général Tiani a pris goût aux milliards de la contrebande.
Son armée s’est découvert une aubaine de taxation des produits de la contrebande pour tout ce qui entre illégalement au Niger. Une grosse manne financière dont le général Tiani vient d’en prendre goût. Et comme il s’agit d’une recette parallèle qui entre directement dans la poche du président, il est hors de question que cette filière s’estompe.
Voilà grosso modo, les éléments qui militent en dépit du bon sens pour le maintien de la frontière fermée du côté du Bénin. Sinon que les explications données le mercredi dernier par le ministre béninois de l’énergie, de l’eau et des mines, Samou Adambi, sur le principe du système de transport inscrit dans le point 1 de l’article 3 de l’accord bilatéral qui sert de charpente juridique au projet de pipeline Niger-Benin ; aurait suffi à raisonner la junte militaire au pouvoir au Niger.
Aboubakar TAKOU
