Qui fut le géniteur principal de la Criet ? D’aucuns diront que c’est l’ancien ministre Joseph Djogbénou. Mais les plus futés et plus avertis, y verront les empreintes digitales des grosses mains de maître Séverin Quenum. Un ami fidèle voire fusionnel de l’ancien bras droit du président Patrice Talon, Olivier Boko. Et c’est peu dire que de ne pas reconnaître qu’en cette double qualité de frère du président Talon et de celui du ministre Séverin Quenum, ce n’est pas lui qui a supervisé la constitution de toute la ressource humaine de la prestigieuse Criet. Il en est quelque part, le père génétique.
Quoi donc de plus normal qu’il comparaisse gaillard devant cette institution qu’il a lui-même tricotée de foi. Malheureusement, devenu prévenu devant cette juridiction, c’est la queue entre les jambes que l’ami et frère du président Talon, jusqu’à une époque récente, veut fuir cette même juridiction. Il ne veut pas courir le risque d’être frappé par cette même dame sous bandeau. Et pour cause, le visage de l’audience de jugement dans la procédure à son encontre avec ses co-accusés hier, où lui et ses complices devraient, en effet, répondre devant la chambre de jugement statuant en matière criminelle, des infractions de complot contre la sûreté de l’État, corruption d’agent public national, faux et usage de faux.
Mais à l’ouverture du procès, leurs avocats ont repris le manège classique estimant que la composition de la Cour serait irrégulière en vertu de l’article 254 nouveau du code de procédure pénale : « Le tribunal de première instance statuant en matière criminelle est composé d’un (01) président et de quatre (04) assesseurs » alors que la composition de jugement comportait un président et deux juges. Sauf qu’ils se foutent tous le doigt dans l’œil jusqu’à l’omoplate.
Cette disposition du code de procédure pénale de 2012, tel que modifié le 18 mai 2018 ne s’applique pas à la CRIET. Oubliant qu’à cette loi générale, le législateur a substitué une loi spéciale plus récente et bien connue de tout le monde. Même des étudiants en première année de droit, le savent bien.
Il s’agit en effet, de la loi 2020-07 du 17 février 2020 relative à la Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme qui dispose en son article 6 nouveau ceci : « La chambre de jugement siège en formation collégiale composée d’un (01) juge-président et de deux (02) assesseurs ». Ainsi, depuis le 17 février 2020, le nombre de magistrats devant siéger pour chaque audience correctionnelle ou criminelle à la CRIET a été réduit de cinq à trois. Ce que tout le monde sait. Une tradition à la Criet depuis bientôt 05 ans.
Coincés donc devant cette dure réalité des textes, les avocats de la défense demandent une suspension pour tenter un autre joker.
Entre-temps, le principal prévenu, Olivier Boko, chuchote dans les oreilles de son avocat qu’il connaît la juge présidente qu’il soupçonne de connaître le président Talon comme s’il y a au Bénin, un cadre qui ne connaît pas l’actuel président. Mais comme cela n’allait pas suffire à faire naître un tsunami dans une tasse de café, il fallait que tous les avocats de la défense se déconstituent ceci avec l’accord tacite des prévenus eux-mêmes.
Toute chose qui rejoint la batterie d’agissements visant à fuir un procès comme c’est le cas où à deux reprises, la défense avait déféré la procédure à la censure de la Cour Constitutionnelle. Puis par trois fois devant la Cour suprême. Et toujours sans succès : ces deux juridictions ont confirmé la régularité de la procédure contre les prévenus.
Mais toutes ces simagrées n’auront empêché que la procédure reprenne ce jour pour la manifestation de la vérité dont l’ancien bras droit du président Talon en a une sainte horreur. Mais comme on fait son lit, on se couche, dit-on.
Aboubakar TAKOU