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Société

Entretien avec le Spécialiste des questions des eaux et risques climatiques, Agnidé Lawin : Voilà pourquoi Cotonou est en proie aux inondations et comment en sortir

« Si la quantité de pluie qui devait tomber en une année, sa moitié tombe en 10h ou en 24h, il n’y a aucun système au monde qui peut l’évacuer. »

Chaque saison pluvieuse, la ville de Cotonou est confrontée au phénomène de l’inondation. Cette catastrophe naturelle et périodique crée sur son passage non seulement des dégâts dont des pertes en vies humaines.

Il est alors nécessaire de voir le phénomène sous un autre angle en tenant compte de l’urbanisation, de l’incivisme et des situations connexes. Alors, pourquoi l’inondation à Cotonou et environs? Quelle responsabilité revient à chacun ? Spécialiste des questions des eaux et risques climatiques, Agnidé Lawin professeur en hydro météorologie donne des explications.

Quand est-ce qu’on parle d’inondation ?

On parle d’inondation lorsque l’eau vient à occuper une zone qu’elle n’occupait pas naturellement auparavent. Il faut dire que l’inondation dans la ville de Cotonou revêt deux aspects. Nous avons ce que nous appelons l’inondation pluvieuse due à une précipitation importante qui est tombée en un temps très cours et nous avons l’inondation fluviale qui est dûe au débordement du lac ou de cours d’eau. Alors, s’agissant donc particulièrement de Cotonou, Cotonou est sous l’impact de ces deux types d’inondations. Il y a des moments où la quantité de pluie qui tombe est si importante que les caniveaux et les drains qui existent naturellement dans Cotonou n’arrivent pas à faire écouler cette quantité d’eau très rapidement vers le lac Nokoué. A ce moment-là les caniveaux sont débordés et donc l’eau est obligée de rechercher sa place naturelle dans les maisons, sur les voies publiques. Ces évènements arrivent de temps en temps mais il faut dire que ces derniers temps, leur nombre a commencé par augmenter. Donc, de plus en plus fréquent.
Ensuite, nous avons l’inondation fluviale qui principalement pour la ville de Cotonou est due au débordement du lac Nokoué. Il peut donc ne pas avoir pluie à Cotonou que certains quartiers riverains du Lac se retrouvent subitement ou progressivement dans l’eau. Le lac Nokoué fait partie du bassin de l’Ouémé et donc s’il y a de grosses pluies à Parakou, Dassa, Savè, Bohicon, Abomey, etc., ces quantités d’eau doivent descendre et venir pour une grande partie passer par le lac Nokoué et cette quantité d’eau arrive à déborder et donc les quartiers périphériques du lac sont inondés. Et les zones comme So-Ava, Ganvié subissent également cette augmentation du niveau de l’eau. Donc, en somme on parle d’inondation lorsque l’eau vient à occuper une zone qui initialement et/ou souvent n’était pas sous l’eau.

Quels sont les facteurs collatéraux liés à l’inondation à Cotonou ?

Si les inondations deviennent de plus en plus fréquentes et les zones impactées s’élargissent, c’est parce qu’il y a des facteurs collatéraux aggravants. Et parmi ces facteurs liés à l’homme, il y a l’occupation de l’espace. Tout le monde veut rester à Cotonou et environ au point où des zones qui sont inappropriés ou des zones qui sont normalement à destinés à accueillir les eaux pluviales sont remblayés par les humains et finalement l’administration est obligée de venir les établir là. Donc, voilà un des facteurs. Le second facteur, c’est l’occupation des couloirs de circulation de l’eau. Là également, lorsque vous occupez les couloirs naturels de l’eau et bien lorsque l’eau arrive, elle cherche forcement sa voie et elle ne peut que se retrouver dans la chambre à coucher avec les individus.
L’autre facteur, les caniveaux, les canalisations artificielles réalisées par les collectivités pour assainir et évacuer les eaux pluviales, il y a également le mauvais comportement des citoyens qui jonchent ces caniveaux par des ordures de toutes sortes. L’ensablement également des caniveaux est un problème majeur. Voilà des facteurs qui aggravent la circulation de l’eau et qui par conséquence impliquent l’inondation à des endroits insoupçonnés.

Un civisme de la part des populations ne fera-t-il pas disparaître le phénomène ?

Si on revient à un civisme normal, on ne dira pas qu’il n’y aura plus d’inondation à Cotonou mais l’inondation pluviale va se réduire. Parce que si tous les caniveaux construits fonctionnent à leur pleine capacité, donc sont vidangés, curés, ils sont dimensionnés normalement pour évacuer les quantités d’eau qui tombent sauf qu’il peut avoir des événements externes parce que si par exemple, la quantité de pluie qui devait tomber en une année, sa moitié tombe en 10h ou en 24h, il n’y a aucun système au monde qui peut l’évacuer.

Parlez-nous des outils de prévention dont dispose le Bénin pour faire face à a l’inondation vu que c’est un phénomène annuel.

Il faut dire et mettre effectivement l’accent sur le civisme et la citoyenneté en ce qui concerne le maintien et l’entretien des infrastructures qui sont réalisées à grand frais pour lutter contre l’inondation pluviale. L’un des outils pour limiter les impacts économiques et humains des évènements extrêmes qui conduisent à l’inondation, des vents violents, des vagues de chaleurs aiguës, l’un des outils est le Système d’Alerte Précoces (SAP). Et ce que le Bénin a aujourd’hui, c’est un SAP aux inondations et il devrait évoluer vers un système d’alerte précoce multirisques, pour permettre la prise en compte non seulement de l’élévation du niveau de la mer mais également des vagues de chaleur. Ce genre de système lorsqu’il est bien monté et tourne normalement avec tous les acteurs, ça permet d’alerter à temps d’éventuels événements qui se forment et risquent de subvenir. Ceci permet alors aux services qui sont en charge de la protection civile d’agir rapidement avec les populations pour sauver tout ce qui est bien et également les humains de la réalisation de ce risque.

Que faire pour limiter les conséquences des inondations (Solutions) ?

Pour limiter les conséquences des inondations qu’elles soient pluviales ou fluviales, c’est d’inviter les populations, toutes les populations de ce pays au respect de la règlementation en vigueur surtout en matière d’installation des établissements humains et des activités socio-économiques, que l’homme libère le lit de l’eau, les baffons et couloirs d’évacuation de l’eau. Que les prochaines infrastructures prennent le phénomène de l’inondation en compte en agrandissant la capacité de rétentions des caniveaux (des réflexions sont en cours dans ce sens). Il est aussi important que lorsque les communautés locales passent des communiqués ordonnant de quitter un endroit pour un autre, que les populations puissent les respecter. L’Agence nationale de protection civiles (ANPC) passe des communiqués, fait des sensibilisations dans le cadre de la mise en œuvre des résultats de prévision et d’alerte, il faut que les populations suivent les consignes de l’ANPC pour sauver non seulement la vie mais aussi les biens économiques.

Entretien réalisé par Gloria AKOAKOU

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